DECISION N° 041/14/ARMP/CRD DU 12 FEVRIER 2014

 

DECISION N° 041/14/ARMP/CRD DU 12 FEVRIER 2014 DU COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES SUR LE RECOURS DE L’ENTREPRISE MATAR GUÈYE  CONTESTANT L’ATTRIBUTION PROVISOIRE DU MARCHE LANCE PAR LA COMMUNE DE SALEMATA ET AYANT POUR OBJET LA CONSTRUCTION D’UN MARCHE HEBDOMADAIRE.

 

LE COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES,

 

Vu le Code des Obligations de l’Administration modifié par la loi n° 2006-16 du 30 juin 2006 ;

 

Vu le décret n° 2011-1048 du 27 juillet 2011 portant Code des Marchés publics ;

 

Vu le décret n° 2007-546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l'Autorité de Régulation des Marchés publics (ARMP) notamment en ses articles 20 et 21;

 

Vu la décision n° 0005/ARMP/CRMP portant règlement intérieur du Conseil de  Régulation des Marchés publics ;

 

Vu le recours de l’entreprise Matar Guèye par courrier du 16 décembre 2013 ;

 

Vu la consignation faite par l’entreprise Matar Guèye le 16 décembre 2013 ;

 

Monsieur Ousseynou CISSE entendu en son rapport ;

 

En présence de Monsieur Mademba GUÈYE, Président ; de Messieurs Samba DIOP, Boubacar MAR et Cheikhou Issa SYLLA, membres du Comité de Règlement des Différends (CRD) ;

 

De Monsieur Saër NIANG, Directeur général de l’ARMP, secrétaire rapporteur du CRD ;

 

Messieurs Cheikh Saad Bou SAMB, conseiller technique ; René Pascal DIOUF, Coordonnateur de la Cellule d’Enquêtes et d’Inspection, Moussa DIAGNE, Chef de la Division Formation ; Mesdames Takia Nafissatou FALL CARVALHO, Conseillère chargée de la Coordination et du Suivi et Khadidiatou DIA LY, chargée d’enquêtes, observateurs ;

 

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

 

Adopte la présente délibération ;

 

Par lettre du 16 décembre 2013, enregistrée le 18 décembre 2013, sous le numéro 568, l’entreprise Matar GUÈYE a saisi le CRD pour contester l’attribution provisoire du marché relatif  à la construction d’un marché hebdomadaire, lancé par la Commune de SALEMATA.

 

LES FAITS

 

Le 20 septembre 2013, la Commune de Salémata a publié, par voie d’affichage et sur le portail des marchés publics, une consultation ayant pour objet la construction d’un marché hebdomadaire à SALEMATA sous la référence PNDL/COM SALEMATA/2013-01.

 

A l’ouverture des plis, les offres des quatre (04) entreprises ci-après ont été reçues :

  • G.I.E Touba Taif Balodji
  • Enterprise Matar Guèye
  • ECCOTRA
  • ALCATRAS

Au terme de l’évaluation des offres, la commission des marchés a proposé d’attribuer provisoirement le marché au GIE Touba Taif Balodji pour un montant TTC de 78 259 149 FCFA. La proposition a été approuvée par l’autorité contractante, qui a ensuite informé les autres candidats du rejet de leurs offres.

 

Ayant pris connaissance des résultats de l’attribution, le 12 décembre 2013, l’entreprise Matar Guèye a saisi directement le CRD d’une requête, par lettre du 16 décembre 2013 pour contester la décision de la commission des marchés.

 

Après avoir déclaré le recours recevable, le CRD a prononcé la suspension de la procédure de passation du marché par décision n° 393/13 du 31 décembre 2013.

 

Par courrier du 20 janvier 2014 reçu le 30 janvier 2014 à l’ARMP, l’autorité contractante a transmis les éléments nécessaires à l’instruction du dossier.

 

LES MOTIFS A L’APPUI DU RECOURS

 

A l’appui de son recours, l’entreprise Matar Guèye soulève essentiellement trois griefs, lesquels sont relatifs à la remise de deux procès-verbaux d’ouverture des plis différents, à la lettre de rejet de son offre financière et au montant de son offre.

 

Sur le grief relatif à la remise de deux procès-verbaux, le requérant soutient que dix jours après l’ouverture des plis, un procès-verbal leur a été remis ; puis, le lendemain, un autre procès-verbal leur a été également transmis. Le requérant signale que les deux procès-verbaux comportent des différences sur les montants des soumissions reportées, la différence des signataires et le listing des pièces administratives mentionnées.

 

L’entreprise Matar Guèye soutient que sur l’un des procès-verbaux, il a été classé moins disant tandis que sur l’autre, un montant différent a été mentionné.

 

Au sujet de la notification du rejet de l’offre, le requérant affirme que la lettre ne leur a été transmise que le 12 décembre 2013, après forte insistance auprès du Maire. De plus, ladite lettre comporte des incohérences puisque datée du 28 décembre 2013.  Les informations relatives au montant de l’attribution, à l’entreprise attributaire et aux  motifs de rejet de l’offre n’ont pas été précisées.

 

Le requérant en conclut que la procédure n’a pas respecté les principes d’égalité, de transparence et d’économie.

 

LES MOTIFS DONNES PAR L’AUTORITE CONTRACTANTE

 

Selon l’autorité contractante, l’entreprise Matar Guèye n’a pas saisi la Commune de Salémata d’un recours gracieux pour exposer son grief sur la procédure et éventuellement les motifs pour lesquels son offre n’a pas été retenue.

 

En ce qui concerne la notification du rejet des offres des candidats non retenus, l’autorité contractante indique que la date du 28/12/ 2013 a été mentionnée par erreur à la place de 28/11/2013.

 

Pour justifier le rejet de l’offre du requérant, l’autorité contractante renseigne que l’entreprise Matar Guèye n’a pas réalisé un chiffre d’affaires annuel moyen pour des travaux au cours des trois dernières années, d’un montant équivalent à 1.5 fois le montant de son offre.

 

A ce propos, la Commune de Salémata estime que le requérant n’a pas présenté de bilan financier mais plutôt neuf (09) attestations de bonne exécution, dont les sept (07) sont les documents qu’elle qualifie de « faux et usages de faux ».

 

En outre, selon l’autorité contractante, le document que la commission avait considéré comme garantie de soumission est plutôt une attestation de capacité financière.

 

L’OBJET DU LITIGE

 

Il résulte de ce qui précède que le litige porte sur le bien-fondé ou non du rejet de l’offre de l’entreprise Matar Guèye, notamment sur les griefs portant sur la remise de deux procès-verbaux d’ouverture des plis différents, sur la notification de l’attribution provisoire.

 

EXAMEN DU LITIGE

 

1-    Sur le grief relatif à la remise de deux procès-verbaux d’ouverture des plis différents :

Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article 67.4 du Code des Marchés publics, dès la fin des opérations d'ouverture des plis, les informations relatives au nom de chaque candidat, au montant de chaque offre, à la présence ou l'absence de garantie de soumission, aux rabais éventuels ainsi que toute autre information utile, sont consignées dans un procès-verbal signé par les membres de la commission des marchés présents et remis à tous les candidats ;

Considérant que le procès-verbal d’ouverture des plis, transmis par l’autorité contractante pour les besoins de l’instruction, mentionne un montant de 68 977 921 FCFA TTC pour l’entreprise Matar Guèye ;

Que cependant, le requérant a joint dans sa requête, en plus du procès-verbal identique à celui transmis par l’autorité contractante, un autre PV d’ouverture des plis qui comporte des divergences avec le premier, notamment sur les montants des offres des entreprises Matar Guèye et Eccotra ;

 

Qu’au regard des offres des candidats susnommés, les montants inscrits sur le procès-verbal d’ouverture des plis transmis par l’autorité contractante sont conformes à ceux mentionnés sur les lettres de soumission ;

 

Qu’en outre, la différence notée sur les montants mentionnés dans le deuxième procès-verbal est due au fait que les montants des soumissions de Matar Guèye et Ecotra ont été intervertis ;

 

Qu’il s’y ajoute que le requérant n’a pas apporté la preuve que le deuxième procès-verbal, qui n’est qu’une copie, émane de l’autorité contractante d’autant plus qu’il n’a pas assisté à la séance d’ouverture des plis ;

 

Qu’en conséquence, même si, comme le fait remarquer le requérant, la transmission du deuxième procès-verbal était avérée et constitue une violation du principe de transparence, il convient de noter que le montant de l’offre de Matar Guèye n’est pas l’argument retenu pour rejeter son offre ;

 

Qu’en effet, bien que sur le procès-verbal d’ouverture des plis, l’entreprise Matar Guèye ait été déclarée conforme sur le critère « garantie de soumission », il ressort de l’instruction qu’en lieu et place d’une garantie de soumission, le requérant a fourni une « attestation de solde »délivrée par la CNCAS qui précise le montant de l’avoir en banque ;

 

Qu’en conséquence, le seul motif tiré du défaut de garantie de soumission suffit pour  rejeter l’offre de Matar Guèye ;

 

2-     Sur le grief relatif à la notification du rejet :

Considérant qu’en ce concerne la notification du rejet de l’offre, l’incohérence constatée sur la date mentionnée dans la lettre relève d’un manquement des services de l’autorité contractante, qui n’ont pas pris les dispositions idoines pour vérifier la lettre avant de la transmettre ;

Que toutefois, cet état de fait n’a pas empêché au requérant d’exercer son droit de recours ;

 

Considérant que dans la procédure litigieuse, les avis d’appel d’offres et d’attribution provisoire n’ont pas fait l’objet de publication par voie de presse ;

 

Qu’en lieu et place, l’autorité contractante a procédé à l’affichage de l’avis d’appel d’offres et à la notification de l’attribution provisoire ;

 

Qu’en agissant ainsi, l’autorité contractante, qui a le statut de commune, a cru devoir appliquer à bon droit, l’arrêté n° 03193 du Ministre des Finances du 07 avril 2010 relatif aux procédures allégées pour les communautés rurales et certaines communes ;

 

Que toutefois, pour les collectivités locales concernées, l’arrêté susvisé ne prévoit la possibilité d’affichage de l’avis d’appel d’offres et de notification de l’attribution que lorsque le montant des travaux est inférieur à 50 millions ou que celui des fournitures et services est inférieur à 25 millions ;

 

Considérant qu’en l’espèce, le  montant estimé du marché de travaux est 80 millions ;

 

Qu’il s’ensuit que l’autorité contractante a appliqué, à tort les dispositions de l’arrêté n°03193 du Ministre des Finances du 07 avril 2010 pris en application de l’article 78 du Code des Marchés publics  puisque dans ce cas de figure, l’avis d’attribution provisoire aurait dû être publiée par voie de presse, tout comme l’avis d’appel d’offres ;

 

Considérant qu’en vertu des dispositions du COA, la violation des règles de publicité entraîne la nullité d’une procédure ;

 

Qu’en conséquence, il y a lieu d’annuler l’attribution provisoire et de reprendre la procédure ;

 

Considérant cependant que le projet peut présenter un intérêt majeur pour les populations qui doivent disposer d’infrastructures dans un contexte d’enclavement ;

 

Qu’à cet égard, il y a lieu d’autoriser la reprise de la procédure par appel d’offres restreint, en procédure d’urgence ;

 

Que la demande n’ayant pas prospéré, il y a lieu de confisquer la consignation.

 

PAR CES MOTIFS :

 

1) Constate que l’entreprise Matar Guèye n’a pas assisté à l’ouverture des plis et n’a pas apporté une preuve suffisante permettant d’attester la transmission, par l’autorité contractante, de deux procès-verbaux d’ouverture des plis;

2) Constate que l’entreprise Matar Guèye a produit une attestation de disponibilité de fonds au lieu d’une garantie de soumission;

3) Constate que même si le grief relatif aux deux procès-verbaux d’ouverture des plis transmis avec des contenus différents était fondé, l’élimination de l’entreprise Matar Guèye se justifie par le simple fait qu’elle n’a pas fourni une garantie de soumission;

 

4) Dit que l’erreur notée sur la date de notification du rejet de l’offre n’a pas empêché le requérant d’exercer son droit de recours;

 

5) Constate que l’autorité contractante a procédé à l’affichage de l’avis d’appel d’offres et l’provisoire alors qu’au vu du montant estimé du marché, la publication par voie de presse est requise ;

 

6) Ordonne la confiscation de la consignation;

 

7) Annule la proposition d’attribution et ordonne la reprise de la procé;

 

8) Autorise, à titre exceptionnel, la Commune de Salémata à reprendre la procédure par appel d’offres restreint en procédure d’urgence ;

 

9) Dit que le Directeur général de l’ARMP est chargé de notifier à l’entreprise Matar Guèye, la Commune de SALEMATA ainsi qu’à la DCMP, la présente décision qui sera publiée sur le portail des marchés publics.

 

Le Président

Mademba GUÈYE

 

Les membres du CRD

Samba  DIOP                                  Boubacar MAR                  Cheikhou Issa SYLLA                

Le Directeur Général

 

Rapporteur

 

Saër NIANG


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