DECISION N° 114/13/ARMP/CRD DU 08 MAI 2013

DECISION N° 114/13/ARMP/CRD DU 08 MAI 2013 DU COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES SUR  LA SAISINE  DU MINISTÈRE DE L’EDUCATION NATIONALE DEMANDANT L’AUTORISATION D’OUVRIR A L’INTERNATIONAL  L’APPEL D’OFFRES N° 14/13/BCI RELATIF A L’ACQUISITION DE MANUELS SCOLAIRES.

LE COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES,

Vu le Code des Obligations de l’Administration modifié par la loi n° 2006-16 du 30 juin 2006, notamment en ses articles 30 et 31 ;

Vu le décret n°2011-1048 du 27 juillet 2011 portant Code des marchés publics ;

Vu le décret n° 2007-546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l’autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP), notamment en ses articles 20 et 21 ;

Vu la décision n° 005/ARMP/CRMP du 19 mai 2008 portant règlement intérieur du Conseil de Régulation des Marchés publics ;

Vu la saisine du Projet d’Appui à la petite irrigation locale (PAPIL) en date du 14 mars 2013 ;

Après avoir entendu le rapport de M. Cheikh Saad Bou SAMBE, Directeur de la Réglementation et des Affaires juridiques,  présentant les moyens et les conclusions des parties,

En présence de Monsieur Mademba GUEYE,  assurant l’intérim de Monsieur Abdoulaye SYLLA, Président, absent, de MM. Mamadou WANE et Babacar DIOP, membres du Comité de Règlement des Différends (CRD) ;

De Monsieur Saër NIANG, Directeur général de l’ARMP, secrétaire rapporteur du CRD, Ely Manel FALL, Chef de la Division Règlementation à a Direction de la Réglementation et des Affaires juridiques, René Pascal DIOUF, Coordonnateur de la Cellule d’Enquête et d’Inspection sur les procédures de passation et d’exécution des marchés publics et délégations de service public, Ousseynou CISSE, chargé d’enquêtes à la Cellule d’enquête et d’Inspection et Mesdames Takia Nafissatou FAL CARVALHO, Conseillère chargée de la Coordination et du Suivi et Khadijetou LY, chargée d’enquête à la Cellule d’enquête et d’Inspection, observateurs ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Adopte la présente délibération fondée sur les faits et moyens exposés ci-après :

Par lettre en date du 03 mai 2013, reçue le même jour, enregistrée le 06 mai 2013 au secrétariat du Comité de Règlement des Différends sous le numéro 203/13, le Ministère de l’Education nationale a saisi le Comité de Règlement des Différends d’une demande de dérogation aux dispositions de l’article 52 du Code des marchés publics suite à l’avis défavorable de la Direction centrale des Marchés publics (DCMP) sur l’ouverture du marché visé en objet à l’international.

LA RECEVABILITE DU RECOURS

Considérant que la saisine du CRD par le Ministère  de  l’Education nationale, autorité contractante, vise l’avis rendu par la DCMP le  03 mai 2013 ;

Que la saisine est fondée sur les dispositions de l’article 140 du décret n°2011-1048 du 27 juillet 2011 portant Code des marchés publics ;

Considérant que le décret n° 2007-546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l’ARMP, en son article 22, donne compétence à la Commission des Litiges du Comité de Règlement des Différends pour statuer sur les saisines relatives aux litiges opposant les organes de l’Administration intervenant dans le cadre de la procédure de passation ou d’exécution des marchés publics et délégations de service public ;

Considérant que le présent litige oppose le Ministère de l’Education nationale à la DCMP, il convient de déclarer recevable le présent recours par application de l’article 22 susvisé.

LES FAITS

Le Ministère de l‘Education nationale a saisi la DCMP d’un avis sur le dossier d’appel d’offres relatif à l’acquisition  de manuels scolaires selon l’approche par les compétences,  après adoption par le Conseil de Régulation, dudit dossier type d’appel d’offres.

Au terme de sa revue, la DCMP a formulé des observations qui ont pu trouver une solution à l’exception de celle relative à la passation du marché par appel d’offres international.

Par courrier du 03 mai 2013, le Ministère de l’Education nationale a saisi le CRD d’une demande d’autorisation pour ouvrir à l’international, l’appel d’offres relatif à l’acquisition de la première étape du curriculum  selon l’approche par les compétences.

LES MOYENS DEVELOPPES A L’APPUI DU RECOURS

Le Ministère de l’Education nationale soutient qu’au vu des enjeux et de l’urgence qui s’attachent au traitement du dossier, notamment la proximité de la rentrée scolaire 2013/2014, toutes les observations formulées par la DCMP ont pu trouver une solution, à l’exception de celle relative à la passation du marché par appel d’offres international au motif que le financement est assuré par le Budget consolidé d’Investissement.

Pour le Ministère de l’Education nationale, le choix multiple de manuels scolaires doit reposer sur une grande diversité de l’offre de manuels, de façon à enrichir les moyens d’enseignement fournis aux écoles.

C’est pourquoi limiter l’offre de manuel au plan national équivaudrait à appauvrir les moyens d’enseignement destinés aux établissements scolaires.

Par ailleurs, de par son envergure, l’appel d’offres susmentionné dépasse les capacités techniques et financières de la majeure partie des maisons d’édition locales.

En référence à la Lettre de politique sectorielle du gouvernement et en raison du contexte du marché caractérisé par « le choix multiple », le Ministère de l’Education nationale demande également que la constitution de groupement réunissant des entreprises communautaires à des entreprises non communautaires, lorsque l’appel d’offres concerné ne peut être satisfait par les entreprises locales,  ne soit pas une obligation , si l’ouverture du marché à l’international est autorisé par le CRD.

Pour justifier sa position, le Ministère de l’Education nationale déclare qu’une telle exigence est incompatible avec la volonté de privilégier la diversité de l’offre et d’ouvrir la concurrence, ce qui peut avoir pour effet de ne pas pouvoir disposer de manuels de grande qualité, tout simplement parce que l’éditeur étranger n’est pas en groupement d’entreprises.

Par ailleurs, l’expérience a montré que dans le secteur du livre, les alliances d’affaires entre les éditeurs nationaux et étrangers doivent se faire naturellement, sinon elles sont vouées à l’échec.

Selon le Ministère de l’Education nationale, les derniers marchés de manuels scolaires lancés par le Ministère de l’Education nationale ont fait apparaître des alliances artificielles entre éditeurs étrangers et opérateurs économiques nationaux qui n’ont aucun lien avec le secteur du livre, ni même avec celui de la Culture et de l’Education.

L’expérience a également montré qu’en cas de groupement, le rôle des éditeurs nationaux se limite à servir de boîte à lettres, rôle qu’ils refusent dans la plupart des cas, de jouer.

Les seules alliances qui ont enrichi le secteur de l’édition découlent de partenariat à long terme basés non pas sur des intérêts financiers et commerciaux immédiats, mais  sur un renforcement des capacités de l’entreprenariat local, principe consacré par la politique du manuel scolaire et du matériel didactique.

Pour toutes ces raisons, le Ministère demande l’autorisation du CRD pour ouvrir à l’international le marché susnommé.

LES MOTIFS DONNES PAR LA DCMP

La DCMP a attiré l’attention du Ministère de l’Education nationale sur le fait qu’elle ne peut, du fait du manquement déjà signalé et des attributions qui sont les  siennes,  émettre  un avis de non objection sur le dossier.

SUR L’OBJET DU LITIGE

Il résulte des faits et motifs ci-dessus exposés que le litige porte sur une autorisation exceptionnelle pour le Ministère de l’Education d’ouvrir à l’international, le dossier d’appel d’offres relatif à l’acquisition de manuels scolaires selon l’approche par les compétences et conséquemment, sur une dérogation sur l’application de l’alinéa 2 de l’article 52 du Code des marchés publics exigeant la constitution de groupement entre les entreprises nationales et les entreprises étrangères si la participation de ces dernières est permise.

AU FOND

Considérant que selon l’article 52 du Code des marchés publics, la participation aux appels à la concurrence et aux marchés de prestations et fournitures par entente directe dont le financement est prévu par les budgets des autorités contractantes est réservée aux seules entreprises sénégalaises et communautaires, régulièrement patentées ou exemptées de la patente et inscrites au registre du commerce et du crédit mobilier ou au registre des métiers au Sénégal ou dans l'un des Etats membres de l’UEMOA ou aux entreprises des Etats appliquant le principe de réciprocité.

Que toutefois, il est dérogé à l’alinéa précédent lorsque l’appel d’offres concerné ne peut être satisfait par les entreprises ci-dessus visées. L’accès aux marchés concernés est alors autorisé aux groupements réunissant des entreprises communautaires à des entreprises non communautaires et constitués conformément aux dispositions de l’article 47 du présent décret.

Considérant que suivant les termes de la Lettre de politique sectorielle du Ministère de l’Education nationale, la politique du manuel scolaire et du matériel didactique reposent sur trois axes principaux : (i) la privatisation de l’élaboration, de l’édition, de la production et de la distribution des manuels scolaires, (ii) l’implantation d’un système de choix multiple de manuels (iii) et la sélection des manuels au niveau des structures déconcentrées de l’éducation.

Considérant que d’une part, les ouvrages, objet de l’appel d’offres, doivent être disponibles pour l’année scolaire 2011-2012, ce qui exclut tout dérapage sur les délais sous peine de priver les élèves d’outils pédagogiques appropriés ;

Que d’autre part, l’instauration d’un système de « choix multiple de manuels » vise avant tout à améliorer la qualité des outils d’enseignement que sont les manuels scolaires, grâce à une diversification de l’offre ;

Considérant que même si l’appel d’offres litigieux est financé à travers le Budget consolidé d’Investissement, il n’est pas certain d’avoir un nombre assez large d’éditeurs disposant d’une capacité technique et financière leur permettant de concourir efficacement au marché ;

Que pour cette raison, l’ouverture du marché à l’international ainsi que la faculté de se constituer en groupement entre les entreprises communautaires et les entreprises non communautaires, sont justifiées ;

Qu’en considération de ce qui précède, il y a lieu d’autoriser, à titre exceptionnel,  l’ouverture de la procédure de sélection dudit marché aux entreprises étrangères ainsi que la faculté de regroupement entre les  entreprises étrangères et les entreprises communautaires ;  

PAR CES MOTIFS :

1) Constate que le marché envisagé, financé sur le budget de l’Etat, est en principe réservé aux seules entreprises sénégalaises et communautaires, régulièrement patentées ou exemptées de la patente et inscrites au registre du commerce et du crédit mobilier ou au registre des métiers au Sénégal ou dans l'un des Etats membres de l’UEMOA ou aux entreprises des Etats appliquant le principe de réciprocité, sauf dérogation, en référence aux dispositions de l’article 52 du Code des Marchés;

2) Constate cependant que les justifications apportées par l’autorité contractante militent en faveur d’une ouverture dudit marché aux entreprises étrangè;

3) Constate également que cet effort d’ouverture risque d’être vain, si le regroupement entre les entreprises étrangères et communautaires est exigé ; à cet égard,

4) Autorise, à titre exceptionnel,  l’ouverture de la procédure de sélection dudit marché aux entreprises étrangères, tout en prévoyant l’application d’une marge de préférence aux entreprises communautaires et aux groupements réunissant des entreprises communautaires et des entreprises non;

5) Dit qu’à titre exceptionnel, la constitution de groupement entre les entreprises nationales et les entreprises étrangères n’est pas;

6) Dit que le Directeur général de l’Autorité de Régulation des Marchés publics est chargé de notifier au Ministère de l’Education nationale et à la DCMP la présente décision qui sera publiée.

 

Pour le Président

Chargé de l’Intérim

 

Mademba GUEYE  

 

Les membres du CRD

 

Babacar DIOP                                                                  

 

Mamadou WANE

 

Le Directeur Général

 

Rapporteur

Saër NIANG


 TELECHARGEZ LE PDF 

 

 

 
Find Top Web Hosting service and read hosting reviews.