DECISION N° 081/13/ARMP/CRD DU 10 AVRIL 2013

DECISION N° 081/13/ARMP/CRD DU 10 AVRIL 2013 DU COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES SUR LE RECOURS DE LA SOCIETE TRIPLE A  CONTESTANT LA DECISION DE REJET DE SON OFFRE CONCERNANT LE LOT 3 DU MARCHE RELATIF A L’EXPLOITATION DES RESTAURANTS CENTRAL, ASD, ESP DAKAR, ENSETP, BLOC ISFAR,-ENSA-CMRT-UFR SANTE, ZIGUINCHOR ET EPT DE THIES, LANCE PAR LE CENTRE DES ŒUVRES UNIVERSITAIRES DE DAKAR (COUD).

LE COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES,

Vu le Code des Obligations de l’Administration modifié par la loi n° 2006-16 du 30 juin 2006 ;

Vu le décret n° 2011-1048 du 27 juillet 2011 portant Code des Marchés publics ;

Vu le décret n° 2007-546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l'Autorité de Régulation des Marchés publics (ARMP) notamment en ses articles 20 et 21;

Vu la décision n° 0005/ARMP/CRMP portant règlement intérieur du Conseil de  Régulation des Marchés publics ;

Vu le recours de la société TRIPLE A en date du 14 mars 2013, enregistré le même jour au Secrétariat du Comité de Règlement des Différends (CRD) sous le numéro 099/13 ;

Monsieur René Pascal DIOUF, entendu en son rapport ;

En présence de Monsieur Abdoulaye SYLLA, Président, de MM. Mademba GUEYE et Babacar DIOP, membres du Comité de Règlement des Différends (CRD) ;

De MM. Saër NIANG, Directeur général de l’ARMP, secrétaire rapporteur du CRD, Mesdames Takia Nafissatou FAL CARVALHO, Conseillère chargée de la Coordination et du Suivi, Khadijetou LY, chargée d’enquête à la Cellule d’Enquête et d’Inspection et Messieurs Ousseynou CISSE, Ingénieur, chargé d’Enquête, Cheikh Saad Bou SAMBE, Directeur de la Réglementation et des Affaires juridiques et Ely Manel FALL, Chef de la Division Réglementation à la Direction de la Réglementation et des Affaires juridiques, observateurs .

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Adopte la présente délibération fondée sur la régularité du recours ;

Par lettre en date du 14 mars 2013, enregistrée le même jour au Secrétariat du Comité de Règlement des Différends (CRD) sous le numéro 099/13, la société TRIPLE A a saisi le CRD pour contester le rejet de son offre concernant le lot 3 de l’appel d’offres relatif à l’exploitation des restaurants Central, ASD, ESP Dakar, ENSETP, Bloc ISFAR,-ENSA-CMRT-UFR Santé, Ziguinchor et EPT de Thiès, lancé par le Centre des Œuvres Universitaires de Dakar (COUD).

LES FAITS

Le 29 août 2012, le COUD a fait publier, dans le journal quotidien « Le Soleil », un avis d’appel d’offres en sept (7) lots relatif à  l’exploitation des restaurants Central, ASD, ESP Dakar, ENSETP, Bloc ISFAR,-ENSA-CMRT-UFR Santé, Ziguinchor et EPT de Thiès.

A l’ouverture des plis du 10 décembre 2012, pour le lot 3 ESP Dakar, les offres suivantes ont été enregistrées :

-       TRIPLE A : 1780 FCFA,

-       GIE TEKENDO : 2140 FCFA,

-       DMP : 1780 CFA,

-       THIAM AMT Sarl : 1800 FCFA,

-       BTN : 2160 FCFA.

Après évaluation des offres, le COUD a fait publier dans le même journal quotidien, le 11 mars  2013, l’attribution provisoire du lot 3 du  marché à DMP, pour le montant de 1595 FCFA TTC.

Au vu de cet avis, TRIPLE A a introduit un recours contentieux devant le CRD par lettre en date du 14 mars 2013, reçue le même jour, pour contester le rejet de son offre.

Par décision n° 063/13/ARMP/CRD du 15 mars 2013, le CRD a ordonné la suspension de la procédure de passation du lot 1 du marché litigieux.

Par lettre en date du 03 avril 2013, l’autorité contractante a fait parvenir au CRD les documents relatifs à l’instruction du recours.

SUR LES MOYENS DEVELOPPES A L’APPUI DU RECOURS

Au soutien de son recours, TRIPLE A a développé deux moyens tirés de la « non-conformité financière » et de la « non-conformité technique » de l’offre de DMP et du « favoritisme » dont a fait montre la commission des marchés du COUD.

Pour conforter le premier moyen excipé, TRIPLE A affirme que l’attestation présentée par DMP à l’ouverture des plis souffre de plusieurs manquements pouvant motiver le rejet de son offre.

D’abord, l’attestation délivrée par la CNCAS ne fait référence à aucun marché spécifique, encore  moins à l’appel d’offres contesté, mais se limite à un inventaire global des avoirs et engagements passés de DMP à l’égard de la CNCAS. Elle ne constitue donc pas une attestation de « disponibilités d’avoirs et de lignes de crédits nets des engagements », comme stipulé dans le DAO.

Ensuite, la situation nette de DMP entendue comme le montant global de ses ressources disponibles pour exécuter le marché, est inférieure aux 100 millions requis dans le DAO, au regard de l’attestation fournie.

En effet, selon le requérant, pour attester qu’un candidat « dispose d’avoirs en liquidités et/ou de facilités de crédits nets d’engagements contractuels et de toute avance, il convient simplement de faire une soustraction entre les avoirs et les engagements.

Or, il relève du document produit par DMP que ce dernier présente des éléments d’actifs (un deposit de 83 millions) et des éléments de passifs (deux engagements contractuels composés d’un crédit à moyen terme de 50 millions et un découvert bancaire de 25 millions), ce qui, dans tous les cas de figure, implique que les soldes dégagés seront toujours inférieurs à 100 millions, comme requis dans le DAO.

Enfin, sous prétexte d’une demande d’éclaircissement, la commission des marchés, au lieu de tirer les conclusions des manquements précités, a adressé une correspondance, le 02 janvier 2013, à DMP en lui demandant « … de préciser qu’elle est établie pour l’exploitation du lot 3 du restaurant ESP de Dakar ».

En retour, tout en restant muet sur ladite demande, DMP a fourni une seconde attestation de capacité financière en vue de régulariser son offre.

S’agissant de son second moyen, TRIPLE A affirme qu’au cours de l’évaluation, DMP a été invité par la commission des marchés du COUD à modifier le contenu de son offre technique, en produisant un mémorandum relatif à la maîtrise de l’hygiène et de la sécurité, élément substantiel de l’offre des candidats, alors que dans son offre initiale, l’attributaire provisoire avait promis, sur l’honneur, de respecter les principes d’hygiène et de sécurité.

A cet égard, TRIPLE A déclare avoir présenté dans son offre technique, une démarche sécurité des aliments, incluant un plan d’action, un manuel de procédures de contrôle de la maîtrise de l’hygiène et de sécurité des alimentations, et signé une convention avec l’ITA et une convention médicale avec des médecins militaires de l’Hôpital Principal de Dakar et intégré dans son Conseil de surveillance des gastro-entérologues du Val de Grâce de Paris.

En raison de ce manquement, la commission des marchés aurait dû déclarer l’offre de DMP non conforme.

Au regard de tous ces manquements, TRIPLE A sollicite l’annulation de l’attribution provisoire du lot 3 à DMP.

SUR LES MOTIFS DONNES PAR L’AUTORITE CONTRACTANTE 

En réponse aux griefs de TRIPLE A, le COUD soutient que le marché a été attribué dans le respect des critères de qualification arrêtés dans le DAO et des dispositions du Code des marchés publics.

En effet, au terme de l’évaluation, les candidats DMP et TRIPLE A ont été déclarés conformes et considérés comme ayant rempli les critères de qualification, mais ont proposé le même prix.

Cependant, sur la base de son expérience et des moyens logistiques qu’il a présentés, la commission des marchés avait jugé DMP plus apte à exécuter le marché et l’avait choisi comme attributaire.

Toutefois, au regard du rapport d’analyse des offres, la DCMP a demandé à  la commission, par lettre du 18 janvier 2013, de départager les deux candidats, en leur demandant de proposer, sous pli fermé, un rabais.

S’étant réunie de nouveau le 25 janvier 2013, la commission des marché a constaté que DMP a proposé un rabais, alors que TRIPLE A n’en avait pas fait. C’est sur cette base que le marché a été attribué à DMP.

S’agissant de la demande d’éclaircissement, elle a été faite en application de l’article 44 du Code des marchés publics.

En ce qui concerne le critère de qualification relatif à la maîtrise des règles d’hygiène et de salubrité, malgré son importance, il ne peut à lui seul déterminer l’attribution d’un marché, comme semble le dire TRIPLE A.

Relativement au critère lié à la capacité financière, le COUD souligne que les deux candidats avaient produit une capacité financière (pas de ligne de crédit proposé). Toutefois, celle de DMP était plus crédible que celle de TRIPLE A qui ne donnait aucune garantie quant à la volonté de la banque d’accompagner son client.

Du reste, TRIPLE A a été invité par lettre n° 12/559 du 31 décembre 2012, au même titre que les autres candidats, à prouver l’existence de moyens additionnels.

La cohérence dans sa démarche aurait voulu qu’il s’abstînt de répondre à la demande de complément de dossiers qui lui a été adressée.

En conclusion, le COUD estime que l’évaluation des offre a respecté l’équité et la transparence 

L’OBJET DU LITIGE

Il résulte des faits, motifs et constatations faites par les parties que le litige porte sur la qualification de DMP et la conformité de son offre.

AU FOND

1-    Sur la qualification de DMP

Considérant qu’à l’IC 5.4 (e) des DPAO, il est stipulé que les candidats doivent disposer d’avoir en liquidité et/ou facilité de crédits nets, d’autres engagements contractuels et de toute avance qui serait versées en vertu du marché, d’un montant au moins de 100 000 000 FCFA pour le lot 3 ;

Considérant que dans son offre, DMP avait fourni, dans un premier temps, une attestation de ligne de crédit délivrée le 07 décembre 2012, par l’agence de la CNCAS sise à la VDN dans laquelle il est mentionné que « l’entreprise dispose des engagements suivants : (découvert FCFA 25 millions ; CMT CFA 50 millions) et d’un deposit d FCFA 83 millions qui sera libéré à fin janvier 2013 » ;

Que, par ailleurs, dans le rapport d’évaluation des offres, il est mentionné que la commission a demandé au candidat des précisions sur les trois éléments qui composent ladite attestation et la preuve qu’elle est accordée pour le financement du lot 3 ;

Qu’en réponse, DMP a produit une nouvelle attestation de capacité financière d’un montant de 200 millions en date du 03 janvier 2013 qui, au demeurant s’analyse plutôt comme une attestation de capacité financière, eu égard à son contenu ;

Considérant que suivant l’article 68 du Code des marchés publics, avant de procéder à l'analyse, à l'évaluation et à la comparaison des offres, la commission des marchés compétente procède à un examen préliminaire, afin de déterminer si les candidatures sont recevables en application de l'article 43 et sont accompagnées des pièces mentionnées à l’article 44, et rejette les offres non recevables.

La commission détermine ensuite si les offres sont conformes aux conditions et spécifications des cahiers des charges ;

Considérant que l’article 69 du Code des marchés publics permet à l’autorité contractante de demander aux candidats de préciser ou de compléter la teneur de leurs offres, sauf si cette demande entraine une modification des offres ou des prix ou des conditions de concurrence ;

Que toutefois, ces éléments ne peuvent être réclamés que pour permettre la comparaison des offres, sans affecter le jeu de la concurrence, ni conduire à une rupture de l’égalité de traitement entre les candidats ;

Qu’à cet égard, le principe demeure celui de l’intangibilité des offres excluant de ce fait, toute négociation permettant au candidat de modifier son offre en vue de l’améliorer ;

Considérant que, saisi d’une demande d’éclaircissement, au lieu de répondre à la demande de la commission des marchés, DMP a produit une nouvelle attestation de capacité financière pour régulariser son offre ;

Qu’ainsi, en permettant à DMP de substituer une nouvelle attestation de capacité financière à la première qu’il avait déposée, la commission des marchés du COUD n’a pas garanti les principes de transparence et d’égalité des candidats ;

Sur la conformité de l’offre de DMP

Considérant qu’à l’IC 5.2(c) des DPAO, il est mentionné qu’il est requis une expérience avérée dans la restauration et une parfaite maîtrise des règles d’hygiène et de salubrité ou travaillant avec un personnel hautement qualifié dans ces domaines;

Considérant que dans le rapport d’analyse des offres, il est précisé que, pour le critère maîtrise de l’hygiène et de la salubrité dans la restauration collective, « DMP a proposé en lieu et place d’une offre technique, une simple lettre d’engagement à respecter l’hygiène et la salubrité. La commission des marchés a demandé au soumissionnaire de produire un dossier technique sur la maîtrise de l’hygiène et de la salubrité alimentaire. Le candidat l’a produit dans les délais et la commission a jugé son offre de maîtrise d’hygiène et de salubrité acceptable » ;

Considérant que, comme relevé précédemment, l’article 69 du Code des marchés publics permet à l’autorité contractante de demander aux candidats de préciser ou de compléter la teneur de leurs offres, sauf si cette demande entraine une modification des offres ou des prix ou des conditions de concurrence ;

Qu’à cet égard, le principe demeure celui de l’intangibilité des offres excluant de ce fait, toute négociation permettant au candidat de modifier son offre en vue de l’améliorer ;

Considérant qu’en l’espèce, la commission des marchés du COUD a permis à DMP de modifier son offre pour la rendre conforme aux exigences du DAO ;

Qu’ainsi, elle a violé le principe d’égalité de traitement des candidats ;

Qu’il y a lieu d’annuler l’attribution provisoire du lot 3 du marché à DMP et d’ordonner la réévaluation des offres sur la base des offres non régularisées ;

PAR CES MOTIFS :

 1) Constate que la société DMP a fourni une nouvelle attestation de capacité financière au lieu de répondre aux demandes d’éclaircissement de la commission des marchés ;

2) Constate, en outre, que DMP a produit, à la demande de la commission des marchés du COUD, un dossier technique sur la maîtrise de l’hygiène et de la salubrité alimentaire, en lieu et place de la lettre d’engagement initialement;

3) Dit qu’en permettant à DMP de modifier son offre en substituant une nouvelle attestation de capacité financière à l’ancienne et en produisant postérieurement un dossier technique sur l’hygiène et la salubrité, la commission des marchés du COUD a violé les principes d’intangibilité des offres, de transparence et d’égalité entre candidats ;

4) Annule l’attribution provisoire du lot 3 à;

5) Ordonne la réévaluation des offres sur la base des offres des candidats et des réponses concernant strictement les demandes d’éclaircissement ;

6) Dit que le Directeur général de l’ARMP est chargé de notifier à TRIPLE A, au Centre des Œuvres Universitaires de Dakar (COUD) et à la DCMP, la présente décision qui sera publiée.

 Le Président

 Abdoulaye SYLLA

 Les membres du CRD

Babacar DIOP                                                                                                                                         

Mademba GUEYE                                                             

Le Directeur Général

Rapporteur

Saër NIANG


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