DECISION N° 166/12/ARMP/CRD DU 19 DECEMBRE 2012

DECISION N° 166/12/ARMP/CRD DU 19 DECEMBRE 2012 DU COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES SUR  LA SAISINE DE LA SENELEC DEMANDANT L’AUTORISATION DE PASSER LE MARCHÉ RELATIF À LA « LOCATION ET EXPLOITATION D’UNE CENTRALE D’ÉNERGIE ÉLECTRIQUE DE 50 MW SUR LE SITE DE KOUNOUNE » PAR APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL SUITE À L’AVIS DÉFAVORABLE DE LA DIRECTION CENTRALE DES MARCHÉS PUBLICS (DCMP).

LE COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES,

 

Vu le Code des Obligations de l’Administration modifié par la loi n° 2006-16 du 30 juin 2006, notamment en ses articles 30 et 31 ;

Vu le décret n° 2011-1048 du 27 juillet 2011 portant Code des marchés publics ;

Vu le décret n° 2007-546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l’autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP), notamment en ses articles 20 et 21 ;

Vu la décision n° 005/ARMP/CRMP du 19 mai 2008 portant règlement intérieur du Conseil de Régulation des Marchés publics ;

Vu le recours en date du 08 novembre 2012 de la SENELEC ;

Après avoir entendu le rapport de M. Ely Manel FALL, Chef de la division réglementation, Direction de la Réglementation et des Affaires juridiques, rapporteur présentant les moyens et les conclusions des parties,

 En présence de Monsieur Abdoulaye SYLLA, Président, de MM. Abd’El Kader NDIAYE, Mamadou DEME et Ndiacé DIOP, membres du Comité de Règlement des  Différends (CRD);

De M. Saër NIANG, Directeur Général de l’ARMP, secrétaire  rapporteur du CRD,  Mme Takia Nafissatou FALL CARVALHO, Conseillère chargée de la Coordination et du Suivi, M. Cheikh Saad Bou SAMBE, Directeur de la Réglementation et des Affaires juridiques,  Ousseynou CISSE, chargé des enquêtes sur les procédures de passation et d’exécution des marchés publics et délégations de service public, observateurs ;

 

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

 Adopte la présente délibération fondée sur les faits et moyens exposés ci-après :

Par lettre en date du 08 novembre 2012, enregistrée le 14 novembre 2012 au secrétariat du Comité de Règlement des Différends sous le numéro 939/12, le Directeur général de la SENELEC a saisi le Comité de Règlement des Différends d’une demande d’autorisation de passer le marché relatif à la « location et exploitation d’une centrale d’énergie électrique de 50 MW sur le site de Kounoune » par appel d’offres international suite à l’avis défavorable de la Direction centrale des Marchés publics (DCMP).

 

SUR LA RECEVABILITE DU RECOURS

Considérant que la saisine du CRD par le Directeur général de la SENELEC, autorité contractante, vise l’avis rendu par la DCMP le 07 octobre 2012 ;

Que la saisine est fondée sur les dispositions de l’article 140 du décret n°2011-1048 du 27 juillet 2011 portant Code des marchés publics ;

Considérant que le décret n°2007-546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement de l’ARMP, en son article 22, donne compétence à la Commission des Litiges du Comité de Règlement des Différends pour statuer sur les saisines relatives aux litiges opposant les organes de l’Administration intervenant dans le cadre de la procédure de passation ou d’exécution des marchés publics et délégations de service public ;

Considérant que le présent litige oppose la SENELEC, en sa qualité d’autorité contractante, à la DCMP, organe de contrôle a priori de la passation des marchés publics, il convient de déclarer recevable le présent recours par application de l’article 22 susvisé.

LES FAITS

La SENELEC a soumis, pour contrôle a priori, à la Direction Centrale des Marchés Publics (DCMP) un projet de dossier d’appel à la concurrence international  relatif à la « location et exploitation d’une centrale d’énergie électrique  de 50MW sur le site de Kounoune ».

Le projet a pour objet la location et l’exploitation de deux (2) tranches d’unités de production de 30MW au gaz et 20MW au Diésel Oil (DO). Il prend en compte la réalisation des infrastructures de base prescrites par les normes de l’installation, du montage et de l’exploitation des unités de production des tranches de 30MW Gaz et de celles de 20MW DO.

L’objectif est de sécuriser la capacité de production d’énergie de SENELEC et de rétablir l’équilibre par rapport à la demande sans cesse croissante, après la mise en œuvre hors service de 1500MW DO des « centrales APR ».

Toutefois, la DCMP a émis un avis défavorable sur le projet de dossier d’appel à la concurrence du fait de l’ouverture de la procédure à l’international au mépris des dispositions de l’article 52 du Code des marchés publics.

LES MOYENS DEVELOPPES A L’APPUI DU RECOURS

Pour la SENELEC, la pertinence du choix d’un « appel d’offres international » est fondée sur les raisons suivantes :

  • aucune entreprise nationale ou communautaire n’est à même de fournir actuellement cette prestation spécifique : « disposer de moteurs diésel d’une puissance 50MW pour location et exploitation ».
  • depuis cinq (5) ans, ce sont des sociétés extérieures (GAY, Aggreko, APR, Hélio,…) qui fournissent ces services d’appoint en production qui sont indispensables  pour faire face à la demande d’énergie.

Elle pense que « l’incapacité des entreprises communautaires à satisfaire la prestation, objet du marché » peut être valablement prouvée par l’expérience de la SENELEC par rapport aux marchés similaires qu’elle a eu à piloter durant les cinq (5) dernières années.

Au regard de ce qui précède, et compte tenu de l’importance et de l’urgence du projet, la SENELEC sollicite auprès du CRD l’autorisation de lancer un appel d’offres international pour les raisons précitées.

LES MOTIFS DONNES PAR LA DCMP

Après examen du dossier, la Direction Centrale des Marchés Publics (DCMP), suivant lettre n°4649/MEF/DCMP/43 du 07 octobre 2012, note en observations qu’il convient de lire : « appel d’offres national » au lieu de « appel d’offres international », au regard de l’article 52 du Code des Marchés Publics, parce que le marché est financé sur budget national.

La DCMP précise, par ailleurs, que « l’incapacité des entreprises communautaires à satisfaire la prestation objet du marché ne peut être prouvée que par le caractère infructueux d’un premier appel d’offres »

SUR L’OBJET DU LITIGE

Il résulte des faits et motifs ci-dessus exposés que le litige porte sur une autorisation exceptionnelle de passer le marché considéré en appel d’offres international nonobstant les dispositions de l’article 52 du Code des marchés publics.

AU FOND

Considérant que l’article 52 du Code des marchés publics dispose que la participation aux appels à la concurrence et aux marchés de prestations et de fournitures par entente directe dont le financement est prévu par les budgets des autorités contractantes énumérées à l’article 2 du Code des marchés publics est réservée aux seules entreprises sénégalaises et communautaires, régulièrement patentées ou exemptées de la patente et inscrites au registre du commerce et du crédit mobilier ou au registre des métiers au Sénégal ou dans l'un des Etats membres de l’UEMOA ou aux entreprises des Etats appliquant le principe de réciprocité.

Que, toutefois, il est dérogé à l’alinéa précédent lorsque l’appel d’offres concerné ne peut être satisfait par les entreprises ci-dessus visées ; l’accès aux marchés concernés est alors autorisé aux groupements réunissant des entreprises communautaires à des entreprises non communautaires et constitués conformément aux dispositions de l’article 47 du même texte ;

Considérant que selon la DCMP« l’incapacité des entreprises communautaires à satisfaire la prestation, objet du marché, ne peut être prouvée que par le caractère infructueux d’un premier appel d’offres » ;

Qu’il y a lieu de relativiser, tout de même, cette position de l’organe chargé du contrôle a priori en ce sens que même s’il peut être admis que le caractère infructueux d’un premier appel d’offres apparaît comme la preuve la plus parfaite pour établir l’incapacité des entreprises communautaires à satisfaire une prestation, il n’en demeure pas moins qu’une conjonction d’autres moyens peuvent également asseoir l’absence d’offres dans un secteur donné ;

Considérant que l’urgence de sécuriser la capacité de production d’énergie de la SENELEC, afin de rétablir l’équilibre relativement à une demande de plus en plus croissante des entreprises et des ménages, ne milite pas pour une preuve fondée sur l’échec d’une première procédure ;

Considérant la nécessité de fournir l’énergie électrique au prix le plus bas pour améliorer la compétitivité des entreprises sénégalaises et sauvegarder  le pouvoir d’achat des populations ;

Que la mise en concurrence vise à obtenir le meilleur rapport qualité/prix et que le prix est largement déterminé par le niveau de la compétition en termes de participation ;

Considérant que l’offre de production d’électricité est limitée dans l’espace de l’Union économique et monétaire Ouest africain (UEMOA) du fait de la structure de ce marché, jadis monopolistique, et que l’efficacité de la commande publique doit amener l’autorité contractante à anticiper sur les risques de soumissions concertées ou d’abus de position de la part de potentiels candidats mais également sur une éventuelle issue infructueuse de la procédure de passation en créant les conditions d’une contestabilité du marché ;

Qu’en considération de ce qui précède, il y a lieu d’autoriser exceptionnellement la passation du marché par appel d’offres international ;

PAR CES MOTIFS :

1) Déclare que la dérogation admise par l’article 52 du Code des marchés publics est conditionnée à l’absence d’expertise au niveau communautaire et à la mise en place de groupements entre entreprises locales et non;

 

2) Dit que même s’il peut être admis que le caractère infructueux d’un premier appel d’offres apparaît comme la preuve la plus parfaite pour établir l’incapacité des entreprises communautaires à satisfaire une prestation, il n’en demeure pas moins qu’une conjonction d’autres moyens peut également asseoir l’absence d’offres dans un secteur donné ;

3) Déclare que l’impératif de sécuriser la capacité de production d’énergie de la SENELEC afin de rétablir l’équilibre relativement à une demande de plus en plus croissante, au bénéfice de la compétitivité des entreprises ainsi que du soulagement des ménages sénégalais, ne milite pas pour une preuve fondée sur l’échec d’une première procé;

 

4) Dit que la mise en concurrence vise à obtenir le meilleur rapport qualité/prix et que le prix est largement déterminé par le niveau de la compétition en termes de;

5) Dit qu’ouvrir le processus de passation au plus grand nombrerend contestable la position des entreprises présentes dans le secteur visé ;

 

6) Dit que le moyen le plus approprié pour assurer cette ambition est l’ouverture du marché à la concurrence; en conséquence,

 

7) Autorise exceptionnellement la passation du marché en question par appel d’offres international et dit qu’il y a lieu de favoriser la constitution de;

8) Dit que le Directeur général de l’Autorité de Régulation des Marchés publics est chargé de notifier à la SENELEC et à la DCMP, la présente décision qui sera publiée.

 

Le Président

 

Abdoulaye SYLLA

 

Les membres du CRD

 

Abd’El Kader NDIAYE                 

 

Mamadou DEME                          

 

Ndiacé DIOP

Le Directeur Général

Rapporteur

 

Saër NIANG


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