DECISION N° 019/12/ARMP/CRD DU 09 FEVRIER 2012

DECISION N° 019/12/ARMP/CRD DU 09 FEVRIER 2012 DU COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES SUR LE RECOURS DE LA SOCIETE MUNIF GROUP S.A CONTESTANT LA DECISION D’ATTRIBUTION DU MARCHE RELATIF  A LA FOURNITURE DE MATERIEL INFORMATIQUE AU PROFIT DE LA SSPP “LE SOLEIL”.

LE COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES,

Vu l’article 30 du Code des Obligations de l’Administration modifié par la loi n°2006-16 du 30 juin 2006 ;

Vu le décret n° 2011-1048 du 27 juillet 2011 portant Code des Marchés publics ;

Vu le décret n°2007-546 du 25 avril 2007 portant organisation et fonctionnement   de l'Autorité de Régulation des Marchés publics notamment en ses articles 20 et 21;

Vu la décision n° 0005/ARMP/CR du 19 mai 2008 porta nt règlement intérieur du Conseil de Régulation des Marchés publics ;

Vu le recours de la société MUNIF GROUP S.A en date du 18 janvier 2012, reçu le 19 janvier 2012 au Service du courrier, puis enregistré le 20 janvier 2012 sous le numéro 093/12 au Secrétariat du Comité de Règlement des Différends (CRD) ;

Après avoir entendu le rapport de M. Cheikh Saad Bou SAMBE, Directeur de la Réglementation et des  Affaires juridiques, rapporteur présentant les moyens et les conclusions des parties,

En présence de Monsieur Abdoulaye SYLLA, Président, de M. Mamadou DEME, Abd’El  Kader NDIAYE et Ndiacé DIOP, membres du Comité de Règlement des Différends (CRD) ;

De M. Saër NIANG, Directeur Général de l’ARMP, secrétaire rapporteur du CRD, Mme Takia Nafissatou FALL CARVALHO, Conseillère chargée de la Coordination et du Suivi, MM. René Pascal DIOUF, Coordonateur de la Cellule d’enquête sur les procédures de passation et d’exécution des   marchés publics et délégations de service public, Ely Manel FALL, Chef de la division réglementation à la Direction de la réglementation et des affaires juridiques, Ababacar DIOUF, Ingénieur chargé des  enquêtes sur les procédures de passation et d’exécution des marchés publics et délégations de service public, observateurs ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Adopte la présente délibération fondée sur la régularité du recours, les faits et moyens exposés ci-après :

Par lettre mémoire en date du 18 janvier 2012, reçue le 19 janvier 2012 au Service du courrier, puis enregistrée le 20 janvier 2012 sous le numéro 093/12 au Secrétariat du Comité de Règlement des Différends (CRD), la société MUNIF GROUP S.A a sollicité l’annulation de la décision d’attribution provisoire du marché portant sur le lot unique du marché de fourniture de matériel informatique au profit de la SSPP « Le Soleil ».

LES FAITS

La SSPP « Le Soleil » a fait publier, dans son propre journal quotidien en date du 18 septembre 2011, un avis d’appel d’offres portant sur le marché susnommé.

Par lettre datée du 04 octobre 2011, la DCMP a fait observer à l’autorité contractante l’obligation    de  respecter,  d’une part, le délai minimal de trente jours fixé pour la préparation   des   offres, d’autre   part, la publication de l’avis d’appel d’offres sur le site officiel des marchés publics.

Après correction, la SSPP « Le Soleil » a fait paraître, dans le même journal, un avis de report fixant au 8 novembre 2011 à 11 heures la date d’ouverture des plis.

Suite à l’évaluation des cinq (5) offres reçues, la commission des marchés a recommandé l’attribution   dudit marché au soumissionnaire ETI pour un montant de 31 704 240 F CFA et a fait publier un avis dans le journal « Le Soleil » en date du 18 janvier 2012.

Par lettre en date du même jour, le soumissionnaire MUNIF GROUP S.A a saisi le CRD d’un recours pour contester la décision de la commission des marchés.

Par décision n°009/12/ARMP/CRD du 26 janvier 2012, le CRD a prononcé la suspension de la procédure de passation du marché susvisé.

SUR LES MOYENS DEVELOPPES A L’APPUI DU RECOURS

A l’appui de sa requête, le requérant déclare qu’il a soumis à l’ouverture des plis du marché litigieux, l’offre la moins disante d’un montant de 21 315 664 F CFA.

Lors de l’évaluation des offres, il a été saisi par lettre à deux reprises par la commission des marchés pour des éclaircissements auxquels il a répondu dans les délais requis.

Toutefois, il a été surpris de constater que le marché a été attribué à la société ETI qui a proposé une offre supérieure de dix millions à la sienne.

Par conséquent, il estime que la décision de la commission des marchés n’est pas fondée et demande au CRD de le rétablir dans ses droits.

SUR LES MOTIFS DONNES PAR LA COMMISSION DES MARCHES

Selon le rapport d’évaluation des offres, le soumissionnaire MUNIF GROUP S.A a été déclaré non conforme pour les raisons suivantes :

•    Absence des états financiers des trois dernières années,

•    Absence du certificat d’origine du matériel proposé et/ou de la lettre d’agrément délivrée par le fabriquant.

La SSPP « Le Soleil » tient à préciser que ces deux critères, qui sont exigés dans le dossier d’appel    d’offres, renseignent, d’une part, sur le degré de fiabilité  du soumissionnaire, d’autre part, sur la qualité du matériel, objet de l’appel d’offres.

Pour éviter les erreurs du passé, la SSPP « Le Soleil » soutient avoir voulu acquérir un matériel haut de gamme, sophistiqué et sûr, destiné à la fabrication du quotidien national.

L’autorité contractante déclare que la société MUNIF GROUP S.A n’a pas pu donner les renseignements convaincants sur le matériel proposé en dépit de deux demandes d’éclaircissements transmises à cet effet.

Selon elle, «ce flou dans l’offre de MUNIF GROUP,  accentué par un niveau de prix anormalement bas par rapport à la réalité du marché, n’a pas milité en faveur de cette entreprise dans le choix».

Pour toutes ces raisons, l’offre de la société   MUNIF   GROUP   S.A   a   été   déclarée   non conforme.

L’OBJET DU LITIGE

Il résulte des faits et motifs ci-dessus exposés que le litige porte sur :

1.   le caractère anormalement bas de l’offre du requérant,

2.   la conformité ou non de l’offre du requérant aux critères de qualification indiqués dans le dossier d’appel d’offres.

AU FOND

1)   Sur l’offre du requérant jugée anormalement basse par la commission des marchés :

Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article 59 du Code des Marchés publics, la commission       des marchés peut rejeter par décision motivée une offre qu’elle juge anormalement basse, si elle détermine que son montant ne correspond pas à une réalité économique par rapport à la prestation offerte, après avoir demandé au candidat toutes précisions utiles concernant en particulier les sous détails des prix ; qu’en pareil cas, le candidat peut justifier son prix notamment du fait :

a)   De l’économie résultant des solutions ou procédés techniques adoptés ;

b)   Des conditions exceptionnellement favorables dont dispose le candidat pour exécuter les travaux ou pour fournir les produits ou les services

c)   De la nécessité d’utiliser des ressources qui, sinon, resteraient inactives ;

Considérant que lors de l’évaluation des offres, la commission des marchés a fait parvenir au requérant, par lettre en date du 1er décembre 2011, une demande d’éclaircissements sur les prix des articles suivants qu’elle trouve anormalement bas :

-    Imac (rubrique n° 2),

-    Mac Pro (rubrique n° 3),

-    Onduleurs (rubrique n° 7) ;

Considérant qu’en réponse par lettre du 7 décembre 2011, le requérant dit confirmer les prix offerts pour les articles indiqués, après avoir étudié les offres de ses fournisseurs  ;

Considérant que par lettre du 13 décembre 2011, la commission des marchés a estimé que   les   réponses apportées par le requérant ne sont pas convaincantes et a enjoint MUNIF GROUP S.A  d’apporter dans les 48 heures, les raisons qui justifient ses prix jugés anormalement bas par rapport à la réalité du marché ;

Considérant qu’en réponse, par lettre du 15 décembre  2011, MUNIF GROUP S.A a réitéré son engagement   à fournir le matériel demandé au prix offert tout en précisant que « les   prix  proposés sont calculés sur la base des prix FOB offerts par notre fournisseur avec qui nous avons de bonnes relations commerciales ; c’est par rapport à ce prix FOB que nous avons calculé le prix CAF ainsi que le prix de revient pour ensuite appliquer notre marge bénéficiaire …. » ;

Considérant qu’à ce propos, la société MUNIF GROUP S.A n’a amené aucun document probant sur la réalité des prix proposés, notamment les échanges de courrier avec son fournisseur voire un document lui attribuant des facilités commerciales ou les factures indiquant les prix FOB, CAF ainsi que le prix de revient des produits visés ;

Considérant que s’il s’impose à l’autorité contractante de veiller à détecter les offres anormalement   basses et de demander aux candidats visés qu’ils apportent la preuve que leur prix correspond à une réalité économique, il est de la prérogative du requérant d’apporter les justificatifs exigés ;

Qu’à cet égard, le requérant n’a pas apporté toutes les précisions utiles pour permettre à la commission des marchés de se forger une opinion sur le montant de son offre ;

2)   Sur la conformité de l’offre du requérant  aux critères de qualification indiqués dans le dossier d’appel d’offres :

Considérant que selon les dispositions de l’article68 du Code des marchés publics, avant de procéder à l'analyse, à l'évaluation et à la comparaison  des  offres, la commission des marchés compétente   procède à un examen préliminaire, afin de déterminer si les candidatures sont recevables et sont accompagnées des pièces exigées, et rejette les offres non recevables.

La commission détermine ensuite si les offres sont conformes aux conditions et spécifications des cahiers des charges.

Considérant également qu’il ressort des dispositions de l’article 59.2 du Code des marchés publics que la qualification du candidat qui a présenté l’offre évaluée la moins disante au regard des capacités juridiques, techniques, environnementales  et financières requises est examinée indépendamment du contenu de son offre, au vu des justifications qu’il a soumises ;

Qu’en application de ces dispositions, la clause 5.1 des Données  particulières du dossier d’appel d’offres (DPAO) mentionne les conditions de qualification suivantes :

i)   Avoir une capacité financière d’au moins trente millions de francs délivrée par une banque connue et de bonne réputation,

ii)  Présenter les états financiers certifiés des trois derniers exercices,

iii)   Avoir une expérience avérée pour la fourniture de matériel informatique,

iv) Présenter la lettre ou la licence d’agrément délivrée par le fabriquant du matériel proposé,

v)    Présenter les certificats d’origine du matériel proposé,

vi) Préciser le champ de la garantie du matériel  ainsi que sa durée ;

2.1 . Sur le  défaut de présentation des états financiers exigés :

Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article 44 du Code des marchés publics, tout candidat doit justifier qu'il dispose des capacités juridiques, techniques, financières et environnementales requises, en présentant tout document permettant de juger de sa capacité financière ;

Qu’au cas où ledit document n’est pas fourni ou est incomplet dans le cadre d’une procédure de passation, la commission des marchés doit les exiger, dans un délai au plus égal à celui imparti à l’autorité contractante pour prononcer l’attribution provisoire.

Considérant également que la clause 30 des Instructions aux candidats prévoit que si une offre  est   conforme pour l’essentiel, l’autorité contractante peut  demander au candidat de présenter, dans un délai raisonnable, les informations ou la documentation nécessaires pour remédier à la non-conformité ou aux omissions non essentielles constatées dans l’offre en rapport avec la documentation demandée ; pareille omission ne peut, en aucun cas, être liée à un élément quelconque du prix de l’offre ;

Considérant qu’en l’espèce, il n’a été relevé nulle part la saisine du requérant pour transmission   de   ses états financiers  exigés à la clause 5.1 des DPAO, documents permettant   d’évaluer   la   santé   financière de l’entreprise à travers une comparaison de plusieurs exercices comptables (bilans, comptes de résultats et annexes) ;

Qu’en procédant de la sorte, l’autorité  contractante ne s’est pas conformée aux dispositions de l’article 44 du code des marchés publics ;

2.2.   Sur le  défaut de présentation des certificats d’origine du matériel proposé et/ou d’une lettre ou licence d’agrément :

Considérant  que la clause 5.1 des Données particulières du dossier d’appel d’offres (DPAO) exige, entres autres, la présentation soit d’une lettre ou de la licence d’agrément délivrée par le fabriquant du matériel proposé, soit d’un certificat d’origine pour être déclaré conforme ;

Considérant que sur la base des documents transmis au CRD, il a été constaté que lesdites informations n’ont pas été transmises, comme mentionné dans le rapport d’évaluation des offres du marché litigieux ;

Considérant qu’il ressort de la clause 29.2 des Instructions aux candidats, qu’une offre conforme   pour l’essentiel est celle qui répond à toutes les stipulations, spécifications et conditions du  dossier d’appel d’offres, sans divergence, réserve ou omission substantielles. Les divergences ou omission substantielles sont celles :

a) qui  limitent  de  manière  substantielle  la  portée,  la  qualité  ou  les  performances des fournitures et services connexes spécifiés dans le marché ; ou

b) qui   limitent,   d’une   manière   substantielle   et   non  conforme   au   dossier   d’appel d’offres, les droits de l’autorité contractante ou les obligations du candidat au titre du marché ; ou

c) dont l’acceptation serait préjudiciable aux autres candidats ayant présenté des offres conformes.

Que l’autorité contractante écartera toute offre qui ne respecte pas les dispositions du dossier d’appel d’offres et le candidat ne pourra pas par la suite la rendre conforme en apportant des corrections à la divergence, réserve ou omission substantielle constatée ;

Considérant qu’en vertu de la clause précitée, le défaut de présentation par le requérant d’un    certificat   d’origine   du   matériel   proposé   et/ou   d’une   lettre   ou   licence   d’agrément constitue une omission substantielle qui, si elle est acceptée, serait préjudiciable aux autres soumissionnaires ayant présenté des offres conformes ;

Que dès lors, le rejet de l’offre litigieuse par la commission des marchés est fondé ;

DECIDE :

1) Constate que le requérant n’a pas apporté la preuve que son prix correspond à une   réalité   économique   pour   permettre   à   la   commission   des   marchés   de   se forger une opinion sur le montant de son offre ; à cet égard,

2) Dit que le rejet de l’offre par la commission des marchés est fondé ;

3) Constate que la  société MUNIF GROUP S.A n’a  pas   présenté ses   états financiers des trois dernières années exigés à la clause 5.1 des DPAO ; toutefois,

4) Dit que la commission des marchés ne s’est pas conformée aux dispositions de l’article  44   f)  du   Code des marchés publics exigeant qu’elle demande au soumissionnaire la production lesdits documents dans un délai raisonnable ;

5)Constate que le requérant n’a fourni ni lettre ou licence d’agrément délivrée par le fabriquant     du   matériel  proposé, encore moins un certificat d’origine pourtant exigés à la clause 5.1 des DPAO ; à cet égard,

6)   Dit que le requérant n’a pas rempli ce critère ;

7)   Confirme le rejet de l’offre de la société MUNIF GROUP S.A ;

8)  Ordonne la continuation de la procédure de passation du marché litigieux ;

9)  Dit que le Directeur Général de l’ARMP est chargé de notifier à la société MUNIF GROUP S.A, à la société SSPP « Le Soleil » et à la DCMP la présente décision qui sera publiée.

Le Président

Abdoulaye SYLLA

Les membres du CRD

Abd’El Kader NDIAYE                

Mamadou DEME                       

Ndiacé DIOP

Le Directeur Général

Rapporteur

Saer Niang

 

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