DECISION N° 027/12/ARMP/CRD DU 07 MARS 2012

DECISION N° 027/12/ARMP/CRD DU 07 MARS 2012 DU COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES SUR LE RECOURS DE LA COMPAGNIE AFRICAINE DE FOURNITURE DE MATERIELS TECHNIQUES (CAFOMT) CONTESTANT LA DECISION DU SERVICE NATIONAL DE L’HYGIENE DECLARANT INFRUCTUEUX L’APPEL D’OFFRES N° 004/10P.PHYTO-M.Int M.Prot/MSP/ SNH/DEM RELATIF A LA FOURNITURE DE PRODUITS PHYTOSANITAIRES, DE MATERIELS TECHNIQUES D’INTERVENTION ET DE PROTECTION.

LE COMITE DE REGLEMENT DES DIFFERENDS STATUANT EN COMMISSION LITIGES,

Vu le Code des Obligations de l’Administration, modifié par la loi n° 2006-16 du 30 juin 2006 ;

Vu le décret n° 2011-1048 du 27 juillet 2011 portan t Code des Marchés publics ;

Vu le décret n° 2007-546 du 25 avril 2007 portant o rganisation et fonctionnement de l'Autorité de Régulation des Marchés publics (ARMP) notamment en ses articles 20 et 21 ;

Vu la décision n° 0005/ARMP/CRMP du 19 mai 2008 por tant règlement intérieur du Conseil de Régulation des Marchés publics ;

Vu le recours de CAFOMT en date du 13 février 2012, reçu le même jour au Service du courrier, puis enregistré le lendemain sous le numéro 166/11 au Secrétariat du Comité de Règlement des Différends (CRD) ;

Après avoir entendu le rapport de M. Cheikh Saad Bou SAMBE, Directeur de la Réglementation et des Affaires juridiques, rapporteur présentant les moyens et les conclusions des parties,

En présence de Monsieur Abdoulaye SYLLA, Président, de MM. Mamadou DEME, Abd’El Kader NDIAYE et Ndiacé DIOP, membres du Comité de Règlement des Différends (CRD) ;

De M. Saër NIANG, Directeur Général de l’ARMP, secrétaire rapporteur du CRD, Mme Takia Nafissatou FALL CARVALHO, Conseillère chargée de la Coordination et du Suivi, MM. René Pascal DIOUF, Coordonateur de la Cellule d’enquête sur les procédures de passation et d’exécution des marchés publics et délégations de service public, Ely Manel FALL, Chef de la division réglementation à la Direction de la réglementation et
des Affaires juridiques, Ababacar DIOUF, Ingénieur chargé des enquêtes sur les procédures de passation et d’exécution des marchés publics et délégations de service public, observateurs ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Adopte la présente délibération fondée sur la régularité du recours :

Par lettre en date du 13 février 2012, reçue le même jour au Service du courrier, puis enregistrée le lendemain sous le numéro 166/11 au Secrétariat du Comité de Règlement des Différends, la société CAFOMT a saisi le CRD pour contester la

décision du Ministère de la Santé, de l’Hygiène publique et de la Prévention, déclarant infructueux, l’appel d’offres N° 004/10P.PHYTO-M.I nt M.Prot/MSP/SNH/DEM ayant pour objet la fourniture de produits phytosanitaires, de matériels techniques d’intervention et de protection.

LES FAITS

Dans le journal « Le Soleil » en date du 23 mai 2011, le Service national de l’Hygiène a fait publier un avis d’appel d’offres, en trois lots séparés, ayant pour objet la fourniture de produits phytosanitaires, de matériels techniques d’intervention et de protection.

Après évaluation des offres, l’autorité contractante notifie à CAFOMT, par lettre du 1er février 2011, sa décision déclarant infructueux, l’appel d’offres susvisé et publie, dans le journal « Le Soleil » du 3 février 2011, l’avis correspondant.

Par lettre du 3 février 2012, CAFOMT introduit, auprès de l’autorité contractante, une demande sur les raisons du rejet de son offre relatif au lot 2 du marché.

En l’absence de réponse dans les délais indiqués, CAFOMT a saisi le CRD d’un recours contentieux.

SUR LES MOYENS DEVELOPPES A L’APPUI DU RECOURS

Dans son recours gracieux, CAFOMT déclare que son offre est substantiellement conforme au dossier d’appel d’offres (DAO).

Le seul point qui peut justifier le rejet de son offre est le non respect de la clause 5.1 des Données particulières du dossier d’appel d’offres, mentionnant que « Le candidat doit avoir une expérience de 3 ans dans la fourniture de matériel d’intervention ».

Toutefois, il poursuit que la commission des marchés a considéré que la société CAFOMT ne remplit pas les critères de qualification puisqu’elle ne possède pas trois ans d’existence, malgré la production d’une attestation de capacité financière de 142 875 000 F CFA, tel que demandé dans le DAO et de deux attestations de bonne exécution concernant la livraison de matériel similaire, dont le montant agrégé est
supérieur au montant de sa soumission.

Par ailleurs, il soutient qu’en référence à la décision n° 150/11/ARMP/CRD du 3 août 2011 rendue par le CRD, « il appartient à l’autorité contractante de fixer les critères de qualification exigés pour prendre part à un marché public, mais lesdits critères ne doivent pas constituer une entrave au libre accès à la commande publique, notamment pour les entreprises nouvellement créées, et violer le principe d’égalité des candidats » ;

En conséquence, le requérant a saisi le CRD pour contester le rejet de son offre.

SUR LES MOTIFS DONNES PAR L’AUTORITE CONTRACTANTE

En réponse au recours introduit, l’autorité contractante déclare que le lot 2 du marché avait été attribué à CAFOMT malgré ses deux ans d’expérience.

Malheureusement, par lettre du 29 août 2011, la DCMP n’a pas suivi les conclusions de la commission des marchés au motif que CAFOMT ne remplissait pas l’expérience de trois ans demandée dans le DAO.

Au vu de l’urgence qui prévalait en ces moments d’hivernage, notamment les risques liés au débordement des fosses septiques, la menace du choléra, la prolifération d’insectes vecteurs de maladies, le manque de produits désinfectants et désinsectisants, l’autorité de tutelle qui est le Ministre de la Santé, de l’Hygiène publique et de la Prévention, a saisi par lettre du 15 septembre 2011, l’organe chargé du contrôle a priori pour demander à la DCMP de « tolérer » ce manquement.

Dans sa lettre réponse du 19 septembre 2011, la DCMP a maintenu son avis défavorable en invoquant la nécessité de respecter scrupuleusement les critères de qualification contenus dans le DAO.

Cette situation a contraint l’autorité contractante à demander, par lettre du 13 décembre 2011, d’une part, que l’appel d’offres litigieux soit déclaré infructueux et, d’autre part, qu’un appel d’offres restreint soit autorisé.

En réponse, par courrier du 20 décembre 2011, la DCMP a donné son accord sur la proposition de déclarer l’appel d’offres infructueux et de relancer les trois lots du marché par appel d’offres restreint.

L’OBJET DU LITIGE

Il résulte des faits, motifs et constatations que le litige porte :

1. sur les motifs de rejet de l’offre du requérant pour n’avoir pas rempli le critère de qualification sur l’expérience des candidats, 
2. sur la contestation de la décision de la DCMP autorisant la procédure de l’appel d’offres restreint après avoir déclaré l’appel d’offres infructueux.

EXAMEN DU LITIGE

1) Sur les motifs de rejet de l’offre du requérant pour n’avoir pas rempli le critère de qualification sur l’expérience des candidats :

Considérant que l’article 27 nouveau du Code des obligations de l’Administration dispose que, dans le respect des principes de libre accès à la commande publique et d’égalité de traitement des candidats, les acheteurs publics peuvent requérir des candidats aux marchés toutes justifications concernant notamment :

- les moyens matériels, humains et financiers dont ils disposent ;
- l’expérience acquise dans la réalisation d’activités analogues à celles faisant l’objet du marché ;

Considérant qu’il résulte de la combinaison des articles 68 et 70 du Code des marchés publics, que la commission des marchés compétente procède à un examen préliminaire, afin de déterminer si les candidatures sont recevables, puis elle propose l'attribution du marché au candidat qui a l’offre conforme évaluée la moins disante et qui est reconnu réunir les critères de qualification mentionnés dans le dossier d'appel à la concurrence ;

Considérant qu’en application de cette disposition, la clause 5.1 des Instructions aux candidats prévoit que le candidat doit posséder une expérience de trois ans dans la fourniture de produits phytosanitaires, de matériels techniques d’intervention et / ou de matériels de protection ;

Considérant que s’il n’est pas contesté qu’il appartient à l’autorité contractante d’exiger des candidats à un marché public qu’ils prouvent leur capacité à exécuter les prestations programmées, la définition desdits critères ne doit pas avoir pour effet « de restreindre l’accès au marché à des entreprises de création récente » ;

Qu’en sus, celle-ci doit être objectivement rendue nécessaire, d’une part, par l’objet du marché et la nature des prestations à réaliser et, d’autre part, par un souci d’efficacité économique allant dans le sens de faciliter l’accès des Petites et Moyennes Entreprises aux marchés, et par ricochet, de favoriser la création de nouvelles entreprises et le développement de l’emploi ;

Considérant également que le marché envisagé porte sur la fourniture de produits phytosanitaires qui nécessite des candidats potentiels, qu’ils bénéficient d’un agrément pour commercialiser lesdits produits au vu des risques liés à la santé publique et à l’environnement et qu’ils proposent des produits de qualité par rapport aux normes requises ;

Qu’à cet égard, il est superflu de demander aux candidats qu’ils justifient en même temps, de l’exécution de marchés similaires, critère rempli par le requérant et d’une expérience de trois ans, critère jugé inapproprié pour ce type de prestations ;

Qu’en ce faisant, l’autorité contractante a porté atteinte aux principes de libre accès à la commande publique et d’égalité des candidats ;

Considérant, cependant, qu’en référence aux dispositions de l’article 88 du Code des marchés publics, tout candidat à une procédure d’attribution d’un marché est habilité à saisir la personne responsable du marché d’un recours gracieux qui peut porter sur la décision d’attribuer ou de ne pas attribuer le marché, les conditions de publication des avis, les règles relatives à la participation des candidats et aux capacités et garanties exigées, le mode de passation et la procédure de sélection retenus, la conformité des documents d’appels d’offres à la réglementation, les spécifications techniques retenues, les critères d’évaluation ;

Que ce recours doit être exercé dans un délai de cinq (5) jours ouvrables à compter de la publication de l’avis d’attribution du marché, de l’avis d’appel d’offres ou de la communication de la demande de proposition sous peine de rejet ;

Considérant que le requérant devait contester la disposition incriminée dans les cinq jours à compter de l’avis d’appel d’offres ou de la communication du DAO ;

Que ne l’ayant pas fait, son recours doit être rejeté ;

2) Sur la contestation de la décision de la DCMP autorisant la procédure de l’appel d’offres restreint après avoir déclaré l’appel d’offres infructueux :

Considérant que selon l’article 64 du Code des marchés publics, l'autorité contractante, après consultation de la DCMP, peut déclarer un appel d'offres infructueux lorsque selon l'avis de la commission des marchés compétente, aucune offre n’a été remise à l’expiration de la date limite de dépôt des offres ou lorsqu'il n'a été proposé que des offres irrecevables ou non conformes, bien que toutes les conditions devant assurer le
succès de l’appel à la concurrence aient été remplies ;

Qu’en cas d’avis favorable de la DCMP, l'autorité contractante peut alors procéder à un nouvel appel d'offres, ou à un appel d'offres restreint si les conditions initiales du marché ne sont pas modifiées ;

Considérant que par lettre du 19 septembre 2011, en réponse à la demande du Ministère de la Santé, de l’Hygiène publique et de la Prévention, de « tolérer » le manquement sur le critère relatif à la justification d’une expérience de trois ans, la DCMP a maintenu son avis défavorable, non sans demander à l’autorité contractante de saisir le CRD au cas où il voudrait poursuivre la procédure de passation ;

Considérant qu’en retour, l’autorité contractante a opté de faire jouer les dispositions de l’article 64 du Code des marchés publics en sollicitant l’avis favorable de la DCMP déclarant l’appel d’offres infructueux et autorisant par la même occasion, le recours à l’appel d’offres restreint, au lieu de saisir le CRD ;

Considérant que d’après les dispositions de l’article 83.4 du Code des marchés publics, il est de la compétence de l’autorité contractante, et non d’un candidat, de contester un avis (ou une autorisation) formulé par la DCMP ;

Qu’à cet égard, il y a lieu de dire que le recours du requérant doit être déclaré irrecevable ;

DECIDE :

1) Dit qu’en vertu de l’article 27 du COA et de l’article 45 du Code des marchés publics, il appartient à l’autorité contractante de fixer les critères de qualification exigés pour prendre part à un marché public ;

2) Dit toutefois que lesdits critères ne doivent pas constituer une entrave au libre accès à la commande publique, notamment pour les entreprises nouvellement créées, et violer le principe d’égalité des candidats ;

3) Constate que l’autorité contractante n’a pas justifié l’adéquation des critères retenus par rapport à la complexité du marché et à la nature des prestations envisagées ;

4) Dit qu’il est superflu, en l’espèce, de demander aux candidats qu’ils justifient en même temps, de l’exécution de marchés similaires et d’une expérience de trois ans, critère jugé inapproprié pour ce type de prestations ; à cet égard,

 

5) Dit que les critères incriminés violent les principes de libre accès à la commande publique et d’égalité des candidats ;

 

6) Constate que le requérant a contesté tardivement le critère jugé discriminatoire, en référence aux dispositions de l’article 88 du Code des marchés publics ; par conséquent,

 

7) Dit que le recours n’est pas fondé ;

 

8) Constate que l’autorité contractante a opté de déclarer l’appel d’offres infructueux et de solliciter le recours à l’appel d’offres restreint, en référence aux dispositions de l’article 64 du Code des marchés publics au lieu de contester l’avis défavorable de la DCMP sur la proposition d’attribution du marché ;

 

9) Dit qu’en référence aux dispositions de l’article 83.4 du Code des marchés publics, la contestation d’un avis ou une autorisation de la DCMP est de la compétence de l’autorité contractante et non d’un candidat ;

 

10)Qu’il y a lieu de déclarer irrecevable, le recours introduit par le requérant ;

 

11)Ordonne la poursuite de la procédure de passation ;

 

12) Dit que le Directeur général de l’ARMP est chargé de notifier à CAFOMT, au Ministère de la Santé, de l’Hygiène publique et de la Prévention, ainsi qu’à la DCMP, la présente décision qui sera publiée.

 

Le Président

 

Abdoulaye SYLLA

 

Les membres du CRD

 

Abd’El Kader NDIAYE Mamadou DEME Ndiacé DIOP

 

Le Directeur Général
Rapporteur

 

Saër Niang

 

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